Rencontre avec Dorian Foulon, le paracycliste qui affronte les athlètes valides

sept. 5, 2019, 12:11

Le Français Dorian Foulon a réalisé une performance historique en août lorsqu'il est devenu le premier paracycliste à disputer le Tour de l'Avenir aux côtés des athlètes valides. Foulon, qui s'entraîne avec l’Equipe Continentale Professionnelle UCI Arkéa-Samsic et courait avec la formation Nouvelle-Aquitaine dans cette épreuve de la Coupe des Nations Moins de 23 ans UCI, court régulièrement dans la catégorie para-cycliste C5 en raison d'un pied-bot qui, malgré plusieurs opérations, entraîne une atrophie de sa jambe. Mais cela n'a pas empêché le coureur de 21 ans de se faire une place sur le Tour de l'Avenir remporté par le Norvégien Tobias Foss.

 

Cette course de 10 étapes est considérée comme l'équivalent d'un Tour de France pour les meilleurs jeunes talents du monde. Parmi les anciens vainqueurs de ces deux épreuves, on retrouve Miguel Indurain (ESP), Laurent Fignon (FRA) et, plus récemment, Egan Bernal (COL). La participation de Foulon était un grand moment pour lui et pour le paracyclisme. Revenons avec lui sur son expérience et son parcours.

 

Dorian, félicitations pour votre participation au Tour de l’Avenir. Comment avez-vous réagi à votre sélection ?

 

« J'ai ressenti beaucoup de fierté et j'ai accueilli cette sélection comme un honneur. Je voudrais en profiter pour remercier la FFC [Fédération Française de Cyclisme] et le comité régional de Nouvelle-Aquitaine. Le niveau était très élevé avec les meilleurs jeunes cyclistes du monde entier. Ma participation était une récompense pour tous ceux qui m'ont soutenu et encouragé. »

 

Quel était votre rôle dans la course ?

 

« Je suis un rouleur et un sprinteur, alors j’ai surtout suivi les échappés. J'avais aussi un rôle important dans le contre-la-montre par équipes [2e étape courue sur 32 km entre Eymet et Bergerac - 22e place pour Nouvelle-Aquitaine], parce que j'étais le plus expérimenté dans notre équipe de six.

Tout allait bien pour moi jusqu'à la sixième étape, mais le froid et la pluie m'ont vidé de mes forces et j'ai dû abandonner. Mais la course restera pour toujours un souvenir extraordinaire et une expérience inoubliable. »

 

 

En plus de porter les couleurs de Nouvelle-Aquitaine, vous courez et vous entraînez avec Arkéa-Samsic. Dites-nous en plus...

 

« L'équipe Arkéa-Samsic m'apporte son soutien depuis le début de l'année. Le Manager Général Emmanuel Hubert et le Directeur Sportif Yvon Ledanois suivaient avec intérêt mes résultats chez les amateurs. J'ai ensuite été invité à participer à un camp d'entraînement avec l'équipe. C'est une association qui m'a beaucoup apporté et qui m'a aidé à décrocher deux autres victoires en amateur cette année. »

 

Comment s'est déroulée votre saison paracycliste 2019 jusqu'à présent ?

 

« J'ai participé aux manches européennes de la Coupe du Monde. A Corridonia, en Italie, j'ai fini quatrième du contre-la-montre et troisième de la course en ligne. Puis à Ostende, en Belgique, j'ai signé mon meilleur temps en contre-la-montre [38' 06"] pour prendre la quatrième place derrière le Champion du Monde UCI en titre Daniel Gebru.

Pour le reste de la saison, je vais participer aux Championnats du Monde UCI qui se dérouleront à Emmen [aux Pays-Bas] la semaine prochaine [11-15 septembre]. Je vise le top 5 dans le contre-la-montre et le podium de la course en ligne. »

 

Quel a été le plus grand moment de votre carrière paracycliste jusqu'à présent ?

 

« Mon plus grand souvenir, c'est ma première victoire en Coupe du Monde, à Maniago, en Italie, en 2017. Cette victoire m'a donné confiance en ma capacité à être dans le coup sur les plus grandes et plus belles courses du circuit. »

 

 

Décrivez votre parcours vers les rangs Elite, svp.

 

« J’ai commencé la compétition à l’âge de 14 ans, mais je n’avais pas beaucoup de choix à cause de mon pied. Mais Christophe [Dizy], qui est aujourd’hui mon entraîneur, m’a tout de même repéré quand j’avais 16 ans, et on a travaillé pour que je grimpe les échelons.

Christophe est mon entraîneur depuis cinq ans. Il est présent tous les jours, et je fais même des sessions derrière scooter avec lui ! On est très proches, parce que ses conseils vont au-delà de l’entraînement. Sa vision de la course est souvent proche de la réalité. Il connaît parfaitement les coureurs et est un grand stratège. »

 

Combien d’heures vous entraînez-vous chaque semaine ?

 

« En moyenne, autour de 10 à 15 heures par semaine, avec un maximum de 20 heures pendant deux ou trois semaines par an, à l'approche du grand objectif de ma saison. C'est intense, mais ça reste éloigné du volume de travail de nombreux coureurs pros de mon âge. Christophe veut s'assurer que je reste en bonne santé, alors on augmente la charge progressivement. Pour les exercices spécifiques, je m'entraîne avec un cardiofréquencemètre, mais je vais aussi m’entraîner en fonction de la puissance en 2020. »

 

Où vivez-vous ?

 

« Je vis à Urt, un petit village du sud-ouest de la France, dans le Pays basque, à la frontière avec l'Espagne. Je suis au Pôle Espoir Paracyclisme depuis cinq ans. C'est une structure fédérale qui rassemble les meilleurs jeunes paracyclistes français. On est cinq, de 16 à 25 ans. »

 

2020 est une grande année, avec les Jeux Paralympiques de Tokyo. Quels sont vos objectifs ?

 

« Le premier objectif est évidemment de se qualifier pour les Jeux de Tokyo. Mais une simple participation ne sera pas suffisante. Je veux ramener une médaille, et pourquoi pas la plus belle ? »

 

Pour finir, pouvez-vous comparer vos expériences du cyclisme et du paracyclisme ?

 

« Il y a beaucoup de respect entre les athlètes des deux disciplines. C'est formidable que l'UCI considère le paracyclisme de la même façon que le cyclisme des athlètes valides. Bien sûr, il n'y a pas la même visibilité, mais les organisateurs et l'UCI font de grands efforts. Il y a aussi de plus en plus d'événements paracyclistes diffusés sur internet. Ça ne peut être que favorable au développement de notre magnifique sport. »