Bernal et Alaphilippe, de San Sebastian au Tour de France et vice versa

Egan Bernal et Julian Alaphilippe, les deux stars du Tour de France 2019, figurent sur la liste des engagés de la Clasica Ciclista San Sebastian, qui se déroule traditionnellement le samedi suivant la Grande Boucle. Il y a un an, la « Klasika » (en langue basque) s’était conclue sur des modes totalement opposés pour les deux hommes. Le Français l’avait emporté, tandis que le Colombien avait lourdement chuté.

A la fin du Tour de France, il semblait, à entendre les commentaires, que la victoire du prodige de Zipaquirá était inscrite dans une chronique de l’histoire écrite à l’avance. La réalité est que le destin d’Egan Bernal tient à plusieurs chutes, pas toutes les siennes.

Le Colombien devait initialement courir le Tour 2019 en soutien de Chris Froome et Geraint Thomas – qui étaient tombés, respectivement au Critérium du Dauphiné et au Tour de Suisse, avec des conséquences fort différentes – après avoir disputé le Giro d’Italia en leader du Team Ineos. Mais Bernal a renoncé à disputer le Giro après une chute sur un rond-point de la principauté d’Andorre une semaine avant.

Un an plus tôt, lors de sa première saison au sein du Team Sky suivant son transfert d’Androni – Sidermec – Bottecchia, Bernal avait comme plan de carrière de disputer La Vuelta Ciclista a España en guise de premier Grand Tour ; mais il avait été orienté vers le Tour de France dans la foulée de sa victoire à l’Amgen Tour of California. Il avait toujours la Vuelta à son programme de 2018 après avoir servi les intérêts de Geraint Thomas et Chris Froome en juillet, mais une chute brutale, 20 kilomètres avant l’arrivée de la Clasica Ciclista San Sebastian en avait décidé autrement. Il avait souffert d’un traumatisme facial et de dents cassées mais avait opéré un retour courageux en fin de saison pour être, avec Primož Roglič et Vincenzo Nibali, l’un des trois derniers adversaires de Thibaut Pinot, au Il Lombardia.

Il y a un an, de son côté, Alaphilippe sortait du Tour de France transformé par la popularité du maillot à pois. Il avait remporté deux étapes de montagne, mais de difficulté moyenne, l’une dans les Alpes, l’autre dans les Pyrénées, et il avait su partager sa joie sans modération avec ses fans dans les premiers critériums d’après-Tour, avant de filer à San Sebastian où ses espoirs de succès étaient altérés par la fatigue. Mais il avait retrouvé ses bonnes jambes en escaladant l’Alto de Jaizkibel, haut lieu de l’épreuve basque créée en 1981 et intégrée à la Coupe du Monde FICP dès 1989, eu égard à l’importance du cyclisme dans cette région du monde. Alaphilippe avait battu Bauke Mollema, son dernier rival, au sprint, au bout de l’Avenida Libertad (l’avenue de la liberté) – un nom de rue qui colle bien à sa manière de courir.

Le Français adore courir au Pays basque. C’est son terrain de jeu favori pour préparer les Classiques ardennaises. Il a remporté trois étapes des deux dernières éditions de l’Itzulia Basque Country, disputé en avril. Bien qu’il ait défié les plus grands grimpeurs près des plus hauts sommets du dernier Tour de France, les côtes relativement courtes correspondent le mieux à son explosivité. Depuis que le Murgil Tontorra (côte de deuxième catégorie) a fait son apparition sur le parcours, moins de dix kilomètres avant l’arrivée à San Sebastian, la « Klasika » lui va comme un gant.

Alaphilippe est aussi un enfant de la musique – son père était chef d’orchestre. L’ambiance qui règne à San Sebastian l’été autour des plages de La Concha et Ondarreta est pour lui – et tant d’autres coureurs – l’environnement idéal pour prolonger l’euphorie du Tour de France. Le week-end suivant l’apothéose à Paris, les champions sont d’ordinaire encore en très grande forme physique et mentale, avant de se soumettre à une nécessaire période de repos.

La fête sera complète cette année avec la première édition de la Donostia San Sebastian Klasikoa, soit la version féminine de la « Klasika ». Annemiek van Vleuten, leader de l’UCI Women’s WorldTour, s’est vu attribuer le dossard numéro 1, et le parcours de 126 kilomètres inclut aussi le franchissement du Jaizkibel et du Murgil Tontorra.