Pogačar remporte une édition historique du Tour de France

22 ans, 9 mois et 27 jours. C'est le temps qu'il a fallu à Tadej Pogačar pour passer du statut de nouveau-né slovène à celui de double vainqueur du Tour de France, le plus jeune dans l'histoire d'une épreuve dont la première édition s'est déroulée en 1903.

Le jeune prodige d'UAE Team Emirates a établi une domination absolue lors des trois dernières semaines pour écrire l'histoire : trois victoires d'étapes (en contre-la-montre et dans les montagnes) et des écarts conséquents au classement général, pour s'offrir le maillot jaune avec 5'20'' d'avance sur Jonas Vingegaard (Jumbo-Visma) et 7’03’’ sur Richard Carapaz (Ineos Grenadiers), le premier Équatorien à monter sur le podium des Champs-Élysées.

“C'est le nouveau Cannibale", a salué le quintuple vainqueur du Tour de France Eddy Merckx, ajoutant sa voix au concert de louanges qui font déjà de Pogačar l'un des plus grands talents de l'histoire du cyclisme sur route. "Pogi", lui, s'est bien amusé : "Le cyclisme est un jeu pour moi depuis que j'ai commencé. J'aime y jouer et je suis super content."

Pour Pogačar, le divertissement a véritablement commencé lors de la 5e étape, le premier grand défi pour les prétendants au classement général. Un contre-la-montre de 27,2 km se présentait devant eux, et personne n'a pu résister au Slovène, vainqueur tout puissant à Laval.

À ce moment, Mathieu Van der Poel (Alpecin-Fenix) portait toujours le maillot jaune, comme il l'a fait pendant six jours dans une première semaine de course particulièrement intense et chargée en émotions. Dès le premier jour, Julian Alaphilippe (Deceuninck-Quick-Step) a enflammé l'épreuve avec une victoire spectaculaire à Landerneau naturellement dédiée à son jeune fils Nino, né juste avant le départ du Tour.

Le lendemain, le Champion du Monde UCI de la course en ligne transmettait son maillot jaune au Champion du Monde Cyclo-cross UCI Van der Poel, auteur d'un numéro à Mûr-de-Bretagne. À l'occasion de son premier Grand Tour, la jeune star dédiait ce succès à son grand-père Raymond Poulidor, figure majeure du l'histoire du Tour, mais qui n'a jamais porté la tunique emblématique.

Pogi, Alaf’ et MVDP figuraient parmi les champions les plus attendus sur le Tour après leurs précédentes batailles au fil de la saison. La première semaine de course a également vu le retour au sommet d'une légende du Tour qui semblait avoir perdu le fil du succès.

À 36 ans, 1 mois et 28 jours, Mark Cavendish est le vainqueur le plus âgé du classement par points, et le premier à s'offrir le maillot vert à dix ans d'écart, une première fois en 2011 et à nouveau cet été.

Ses dernières victoires sur le Tour remontaient à 2016, et ses dernières saisons avaient été particulièrement éprouvantes, avec des difficultés physiques et psychologiques. Mais le Missile de l'Ile de Man a rappelé à tout le monde qu'il était un sprinteur et un champion unique en levant ses poings rageurs à l'arrivée de la 4e étape, à Fougères, où il s'était déjà imposé en 2015.

Les souvenirs du passé ont continué à affluer après un deuxième succès à Châteauroux (6e étape), célébré avec les mains sur le casque pour imiter l'expression d'incrédulité qu'il affichait 13 ans plus tôt au moment de remporter sa première étape sur le Tour, dans la même ville.

Un succès supplémentaire à Valence (10e étape), un autre à Carcassonne (14e étape), et Cavendish portait son bilan à 34 victoires d'étapes, autant que la légende Eddy Merckx dans les années 1960 et 1970.

Cavendish a dominé les sprints - après avoir vu Tim Merlier (Alpecin-Fenix) s’imposer à l'arrivée à Pontivy (3e étape) -, et Pogačar a soigné son palmarès dans les montagnes, avec deux succès aux sommets du Col du Portet et de la montée de Luz Ardiden (17e et 18e étapes). Ces deux vainqueurs en série ont marqué le Tour de leur empreinte, mais la course, largement débridée, a également ouvert les portes du succès à de nombreux attaquants.

Dylan Teuns (Bahrain-Victorious), Ben O’Connor (AG2R Citroën Team), Nils Politt (Bora-Hansgrohe), Bauke Mollema (Trek-Segafredo), Sepp Kuss (Jumbo-Visma) et Patrick Konrad (Bora-Hansgrohe) se sont tous imposés en échappée. Matej Mohoric (Bahrain-Victorious) l'a même fait deux fois, au Creusot (7e étape) et à Libourne (19e étape).

Wout van Aert (Jumbo-Visma) a fait encore mieux, avec trois succès dans des registres opposés. Après ses trois victoires au sprint en 2019 et 2020, le Belge a dompté le Mont Ventoux lors de la 11e étape avant de remporter le contre-la-montre de Saint-Émilion (20e étape) tout en puissance.

Van Aert réservait un dernier feu d'artifice pour les Champs-Élysées, où il est devenu le premier coureur à remporter un sprint, une étape de montagne et un contre-la-montre individuel au cours d'une même édition du Tour depuis Bernard Hinault en 1979. Une performance étourdissante pour conclure un Tour de France historique.